Obstacles à l’accès à l’avortement

A woman waiting on a train platform as the train pulls in
L’accès aux soins d’avortement au Canada s’est amélioré dans de nombreuses régions, ces dernières années, mais des obstacles persistent pour plusieurs personnes. Ces obstacles ne touchent pas tout le monde de la même façon; les personnes les plus marginalisées sont celles qui rencontrent le plus d’obstacles dans l’accès aux soins. 
Face à de nombreux obstacles, l’avortement peut être hors de portée pour plusieurs personnes. Certaines réussissent à y accéder après de longs délais ou en déboursant de leur poche des centaines, voire des milliers de dollars. D’autres sont forcées de mener à terme une grossesse non intentionnelle, ce qui a des effets dévastateurs sur la personne enceinte, sa famille et sa communauté.
Des organismes de défense du droit à l’avortement et des groupes locaux offrent des informations, des ressources et du soutien aux personnes souhaitant avorter, mais ces services sont très limités et ne suffisent pas à combler les lacunes de l’accès à l’avortement au Canada.

Quels sont les obstacles les plus courants aux soins d’avortement?

Ces obstacles peuvent se recouper et se renforcer mutuellement, ce qui complique d’autant plus l’accès à l’avortement sûr et en temps opportun.

Qui rencontre des obstacles à l’avortement au Canada?

Les personnes qui ont accès à des moyens financiers et qui jouissent d’une liberté de mouvement, d’une sécurité d’emploi et d’un soutien pratique arrivent souvent à surmonter des obstacles comme la nécessité de voyager et/ou de payer pour un avortement.
Mais pour les personnes déjà confrontées à d’autres obstacles dans leur vie quotidienne, la démarche pour accéder à l’avortement peut ressembler à une course à obstacles impossible. Les obstacles à l’accès aux soins médicaux ne sont pas des fautes individuelles; ils démontrent que nos systèmes de santé pratiquent l’exclusion et que tout le monde n’y est pas servi de la même façon.
Plusieurs facteurs déshabilitants se recoupent, ce qui exacerbe la vulnérabilité. Voici un aperçu de certains groupes qui rencontrent de plus grands obstacles en matière d’accès. Les personnes qui s’identifient à de multiples groupes subissent des répercussions négatives croisées, donc plus marquées.
Four women facing away from the camera, with their arms around each other's backs

Qu’en est-il des limites d’âge gestationnel?

L’avortement étant décriminalisé, il n’existe pas de loi limitant les soins en fonction de l’âge gestationnel.
Cependant, de nombreux autres facteurs influencent la disponibilité des soins liés à l’avortement en fonction de diverses limites d’âge gestationnel. La combinaison de ces facteurs signifie qu’il existe des limites d’âge gestationnel fonctionnelles – et non légales – pour les soins liés à l’avortement dans chaque province et territoire. Ces facteurs sont les suivants :

Quels sont les autres obstacles à l’accès?

Des obstacles liés à la santé mentale peuvent aussi affecter l’accès aux soins d’avortement et y rendre l’accès plus complexe.

Le refus de soins fondé sur des croyances

Même si l’avortement est une composante essentielle des soins de santé génésique, un·e médecin ou un·e infirmier·ère praticien·ne peut refuser de fournir des soins liés à l’avortement en raison de ses valeurs personnelles ou de ses croyances religieuses, comme le permettent les lois et réglementations en vigueur. Cette pratique est souvent appelée « objection de conscience » (l’expression « refus de soins fondé sur des croyances » pourrait être plus exacte pour décrire cette situation).
Dans plusieurs provinces et territoires, les médecins qui refusent de soigner des patient·e·s en raison de valeurs ou de convictions personnelles ne sont pas tenu·e·s de les orienter vers un·e spécialiste, mais les infirmier·ère·s praticien·ne·s le sont. Le fait de refuser l’accès à l’avortement en temps voulu a des conséquences sociales et de santé indéniables.
A young woman wearing a fairy outfit at a protest holds a sign that says "Abortion is Healthcare"

Vous souhaitez plus d’information sur le refus de soins fondé sur des croyances, dans votre province ou territoire?

L’accès à l’avortement après 20 semaines

Au Canada, la majorité des avortements ont lieu au cours des 12 premières semaines de grossesse.28 Cela dit, il est essentiel de garantir l’accès aux soins liés à l’avortement au-delà du premier trimestre afin de faire progresser l’équité en matière de santé génésique. De nombreux obstacles à l’accès à l’avortement peuvent empêcher une personne d’accéder aux soins plus tôt au cours de sa grossesse. Les retards peuvent être causés par :

  • la non-disponibilité ou le manque de disponibilité des services à proximité;
  • le manque d’accès à un mode de transport;
  • l’incapacité de payer le coût du transport, ou le besoin de plus de temps pour amasser l’argent;
  • le fait de ne pas avoir de congé payé ou le risque de perdre un emploi à cause d’un congé; ou
  • le fait de vivre de la maltraitance familiale ou du partenaire intime, limitant la capacité de prendre un rendez-vous ou d’aller à celui-ci.

Les personnes en situation d’itinérance, les personnes aux prises avec une dépendance sévère, les personnes sans papiers, non assurées, ou confrontées à des situations d’urgence constante en raison de la monoparentalité, de la pauvreté ou de la violence familiale, sont également plus susceptibles d’avoir des difficultés à accéder à des soins en temps opportun. Personne ne devrait être privé de son droit de faire des choix éclairés et autonomes en matière de procréation en raison du stade de la grossesse, d’autant plus que les personnes dont la réflexion ou la décision a été retardée se trouvent souvent dans une situation vulnérable et précaire. Or ce sont ces personnes qui sont le plus souvent privées de leur droit à l’avortement et à l’autonomie corporelle lorsque l’accès aux services d’avortement après le premier trimestre est limité.

En raison des restrictions imposées aux résident·e·s de certaines régions ainsi que d’une demande écrasante alors qu’il manque cruellement de ressources, les soins liés à l’avortement après 20 semaines sont peu disponibles au Canada. Cela augmente la probabilité que des personnes déjà vulnérables et disposant de moins de ressources soient confrontées à des problèmes logistiques de plus en plus complexes, à davantage de dépenses personnelles, à des distances de déplacement plus importantes et à des temps d’attente plus longs. Il en résulte des retards qui augmentent la probabilité de se voir refuser un avortement et donc d’être obligées de mener à terme une grossesse non désirée.

Ces dernières années, un certain nombre d’hôpitaux dans Canada ont commencé à fournir des services d’avortement après 24 semaines. Auparavant, les Canadien·ne·s devaient se rendre aux États-Unis pour avoir accès à ces services après cette période de gestation.

On estime que des centaines de personnes, chaque année, traversent la frontière pour accéder à des services qui ne sont pas disponibles au Canada, bien qu’elles soient couvertes par un système de santé universel.29  L’accès aux soins aux États-Unis reste l’option la plus accessible pour de nombreuses personnes souhaitant un avortement au-delà de 24 semaines, même si le jugement Dobbs qui a renversé le jugement Roe v. Wade, et l’interdiction ou la restriction sévère de l’avortement qui en a résulté dans plus de la moitié des États ont submergé les points de services où les Canadien·ne·s se rendent pour obtenir des soins.

Bien que les provinces soient tenues de couvrir les frais d’intervention de tous les services médicalement nécessaires qui ont été obtenus à l’étranger, y compris les soins d’avortement, elles ne disposent pas toutes de l’infrastructure et des procédures nécessaires pour le faire. Se rendre à l’étranger pour accéder aux soins est souvent limité aux personnes qui ont les moyens et la capacité de voyager. Concrètement, cela exclut les personnes sans papiers ou les migrant·e·s qui n’ont pas l’autorisation de voyager, les personnes qui ont besoin d’un visa, celles qui vivent avec des troubles mentaux sévères, celles qui sont accusées d’infractions pénales, de nombreuses personnes qui ont besoin de transporter de la méthadone ou qui souffrent d’une dépendance sévère, les jeunes, les personnes qui sont dans des relations abusives et d’autres personnes vulnérables.

Les impacts de l’échec à obtenir un avortement

Lorsqu’une personne n’arrive pas à obtenir un avortement, qu’elle souhaite et dont elle a besoin, elle est plus susceptible d’avoir des problèmes financiers, de santé et familiaux.30 Ces résultats ont été bien documentés dans l’étude Turnaway. Une personne qui se voit refuser l’accès à l’avortement a des risques plus élevés de :

  • vivre des insécurités et difficultés économiques pendant plusieurs années;
  • rester en contact avec un partenaire violent;
  • être aux prises avec des problèmes de santé plus sérieux et plus longs.

Les conséquences négatives du refus de l’avortement affectent également les familles et les communautés. Les enfants nés à la suite d’un refus d’avortement, ainsi que leurs frères et sœurs, ont un développement et des résultats financiers moins bons.

L’accès à l’avortement est essentiel pour la santé et le bien-être des individus, de leurs familles et de leurs communautés.

Références

1 Sethna, C., & Doull, M. (2013). Spatial disparities and travel to freestanding abortion clinics in Canada. Women’s Studies International Forum, 38, 52–62. https://doi.org/10.1016/j.wsif.2013.02.001

2 Sorhaindo, A. M., & Lavelanet, A. F. (2022). Why does abortion stigma matter? A scoping review and hybrid analysis of qualitative evidence illustrating the role of stigma in the quality of abortion care. Social science & medicine (1982), 311, 115271. Advance online publication. https://doi.org/10.1016/j.socscimed.2022.115271

3 Ennis, M., Renner, R. M., Olure, B., Norman, W. V., Begun, S., Martin, L., Harris, L. H., Kean, L., Seewald, M., et Munro, S. (2023). Experience of stigma and harassment among respondents to the 2019 Canadian abortion provider survey. Contraception, 124, 110083. https://doi.org/10.1016/j.contraception.2023.110083

4 LaRoche, K. J., et Foster, A. M. (2015). Toll free but not judgment free: evaluating postabortion support services in Ontario. Contraception, 92(5), 469–474. https://doi.org/10.1016/j.contraception.2015.08.003

5 Rudrum, S. (2022). Student Encounters with a Campus Crisis Pregnancy Centre: Choice, Reproductive Justice and Sexual and Reproductive Health Supports. Canadian Journal of Sociology, 47(1). https://doi.org/10.29173/cjs29754

6 LaRoche, K. J., et Foster, A. M. (2015). Toll free but not judgment free: evaluating postabortion support services in Ontario. Contraception, 92(5), 469–474. https://doi.org/10.1016/j.contraception.2015.08.003

7 Bombay, A., Matheson, K., et Anisman, H. (2009). Intergenerational trauma: Convergence of multiple processes among First Nations peoples in Canada. International Journal of Indigenous Health, 5(3), 6-47.

8 Ibid

9 Silverman, J. G., et Raj, A. (2014). Intimate Partner Violence and Reproductive Coercion: Global Barriers to Women’s Reproductive control. PLOS Medicine, 11(9), e1001723. https://doi.org/10.1371/journal.pmed.1001723

10 Assifi, A. R., Kang, M., Sullivan, E. A., et Dawson, A. J. (2020). Abortion care pathways and service provision for adolescents in high-income countries: A qualitative synthesis of the evidence. PloS one, 15(11), e0242015. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0242015

11 La santé des communautés LGBTQIA2 au Canada : Rapport du Comité permanent de la santé. (2019). Dans Chambres des communes du Canada.

12 Access for Everybody: Disability inclusion in abortion and contraceptive care. (2018). Ipas. https://www.ipas.org/wp-content/uploads/2020/07/AEDIOE18-AccesForEveryone.pdf

13 Gleason, J. L., Grewal, J., Chen, Z., Cernich, A. N., et Grantz, K. L. (2021). Risk of adverse maternal outcomes in pregnant women with disabilities. JAMA Network Open, 4(12), e2138414. https://doi.org/10.1001/jamanetworkopen.2021.38414

14 Lee, J., et Pausé, C. (2016). Stigma in practice: Barriers to health for fat women. Frontiers in Psychology, 7. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2016.02063

15 A Reflection on BMI Limits. (2021). Choice in Health Clinic. https://choiceinhealth.ca/blog/a-reflection-on-bmi-limits

16 CityNews. (22 novembre 2021). https://montreal.citynews.ca/2021/11/22/montreal-abortion-fat-shamed/ 

17 Paynter, M. J., et Norman, W. V. (2022). The Intersection of Abortion and Criminalization: Abortion Access for People in Prisons. Seminars in reproductive medicine, 40(5-06), 264–267. https://doi.org/10.1055/s-0042-1758481

18 Paynter, M., Hernández, P. P., Heggie, C., McKibbon, S., et Munro, S. (2023). Abortion and contraception for incarcerated people: A scoping review. PLOS ONE, 18(3), e0281481. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0281481

19 Ibid

20 Procedural Abortion Care for People in Prison in Canada. (s.d.). Wellness Within. https://caps-cpca.ubc.ca/AnnokiUploadAuth.php/1/16/Procedural_Abortion_Care_Guidebook.pdf

21 Paynter, M., et Heggie, C. (2023). Identifying abortion access barriers and facilitators for people in prison in Canada. 45(5): 364. https://doi-org.ezproxy.lib.torontomu.ca/10.1016/j.jogc.2023.03.077

22 Stern, C. (8 mai 2021). Why BMI is a flawed health standard, especially for people of color. Washington Post. https://www.washingtonpost.com/lifestyle/wellness/healthy-bmi-obesity-race-/2021/05/04/655390f0-ad0d-11eb-acd3-24b44a57093a_story.html

23 Gordon, A. (12 décembre 2021). The bizarre and racist history of the BMI - elemental. Medium. https://elemental.medium.com/the-bizarre-and-racist-history-of-the-bmi-7d8dc2aa33bb

24 Mishra, K., et Floegel-Shetty, A. (2023). What’s wrong with overreliance on BMI? AMA Journal of Ethics, 25(7), E469-471. https://doi.org/10.1001/amajethics.2023.469

25 Tomiyama, A. J., Hunger, J. M., Nguyen-Cuu, J., et Wells, C. (2016). Misclassification of cardiometabolic health when using body mass index categories in NHANES 2005–2012. International Journal of Obesity, 40(5), 883–886. https://doi.org/10.1038/ijo.2016.17

26 Stern, C. (8 mai 2021). Why BMI is a flawed health standard, especially for people of color. Washington Post. https://www.washingtonpost.com/lifestyle/wellness/healthy-bmi-obesity-race-/2021/05/04/655390f0-ad0d-11eb-acd3-24b44a57093a_story.html

27 Le refus de fournir des soins de santé au Canada. (2023). Dans Coalition pour le droit à l’avortement du Canada. https://www.arcc-cdac.ca/media/position-papers/fr/95-refus-fournir-des-soins-de-sante.pdf

28 Avortements provoqués déclarés au Canada en 2021 : mise à jour. (2023). Institut canadien d’information sur la santé. https://www.cihi.ca/sites/default/files/document/induced-abortions-reported-in-canada-2021-update-data-tables-fr.xlsx

29 Connolly, A., & Browne, R. (28 mai 2019). How the wave of U.S. restrictions will affect Canadian women sent there for abortions - National | Globalnews.ca. Global News. https://globalnews.ca/news/4354376/donald-trump-abortion-rights-canada-access/

30 The Turnaway Study. (sans date). ANSIRH. https://www.ansirh.org/research/ongoing/turnaway-study

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